TVA : comment bien la gérer pour une activité e-commerce en Europe ?

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Si la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA) est assez simple à appliquer sur des produits locaux pour des clients locaux, c’est un véritable casse-tête, bourré de règles et d’exceptions, quand on vend à l’International des produits importés. Les sites e-commerce et les marketplaces ont souvent pour ambition de casser les frontières des pays et sont donc pleinement concernés par la complexité de la gestion de la TVA.

Dans ce premier article, nous tentons d’y voir clair dans un système réglementaire et fiscal complexe, grâce à quelques repères clés destinés aux exploitants des plateformes de vente en ligne sur le territoire européen (présence physique du vendeur et/ou de l’acheteur dans l’Union européenne). Après une courte présentation de la TVA (son rôle, son fonctionnement), nous faisons un focus sur le “Paquet TVA e-commerce” qui revoit en profondeur l’application de la TVA dans l’Union européenne depuis le 1er juillet 2021.

Dans un second article, nous verrons comment appliquer concrètement les règles de calcul de la TVA sur un site e-commerce ou une place de marché, en prenant quelques cas concrets, basés sur des situations, des types de produits, des contextes clients. Ils montreront la nécessité de bien définir le périmètre de jeu pour éviter le capharnaüm fiscal !

Avant d’aller plus loin, deux points de vigilance importants :

  • Nous donnons ici quelques réponses vulgarisées, mais il faut toujours s’assurer de la bonne application de la TVA dans son propre contexte. L’intervention d’experts (comptabilité, fiscalité, gestion des importations) est donc plus que souhaitable !
  • Les règles changent. Ce que nous écrivons maintenant peut se révéler obsolète plus ou moins rapidement. Là encore, informez-vous, demandez confirmation !

La TVA, c’est quoi ?

La taxe sur la valeur ajoutée est un impôt indirect sur la consommation qui vise l’utilisateur final du produit ou du service acheté (donc le particulier). L’entreprise qui vend au particulier le produit ou le service (activité B2C) majore son prix de vente hors taxe (HT) du montant de la TVA pour obtenir le prix “toutes taxes comprises” (TTC). Le montant de la TVA est calculé via un taux de TVA, un pourcentage appliqué sur le prix HT.

Par exemple, une plaquette de chocolat aux noisettes à 3,00 € HT sera vendue 3,60 € TTC (application d’un taux de TVA de 20 %), alors qu’une boîte de chocolat en poudre à 3,00 € HT sera vendue 3,17 € TTC (application d’un taux de TVA de 5,5 %).

Pourquoi 3,17 € TTC, et non 3,16 € TTC, alors que le calcul exact donne 3,165 € ? Parce que, par convention en France, c’est la règle de l’arrondi par excès (défini comme arrondi financier) qui s’applique. Bien sûr, si le montant avait été de 3,164 €, il serait arrondi à 3,16 €. Et avec 3,166 €, nous obtiendrions 3,17 €.

Les particuliers sont bien ceux qui payent la TVA au final, mais une entreprise qui vend à une autre entreprise (activité B2B) l’appliquera aussi dans de très nombreux cas ! C’est notamment très courant quand la vente se fait sur un même territoire.

L’entreprise qui achète va donc verser un somme supplémentaire à son fournisseur (le montant de la TVA), mais comme elle ne la doit pas à son administration fiscale, elle va la déduire de la TVA qu’elle collecte elle-même via ses propres ventes.

La TVA est donc neutre dans le bilan de l’entreprise, même si cette dernière doit souvent gérer les impacts d’un décalage de trésorerie entre la TVA collectée, la TVA déductible et les remboursements de TVA effectués par l’administration fiscale.

Mise en œuvre pour la première fois en France en 1954, la TVA existe maintenant dans près de 170 pays. Le problème, c’est que les règles d’application ne sont pas uniques, elles varient fortement au sein d’un pays (plusieurs taux selon les produits, nombreuses exceptions, zones particulières), mais aussi d’un pays à l’autre. C’est ce qui fait tout son charme… Un vrai challenge d’implémentation sur les plateformes de vente en ligne !

B2B et B2C, deux approches différentes

Comme nous venons de le voir, si une vente se fait entre deux professionnels situés sur le même territoire, le fournisseur applique la TVA en vigueur sur ce territoire et l’acheteur paie la TVA puis la déduit de sa déclaration. Il y a des exceptions bien sûr, mais restons dans le cadre général.

Si le fournisseur vend à un acheteur professionnel situé dans un autre pays de l’Union européenne, la facturation se fera HT. L’acheteur aura la responsabilité de régler sa situation vis-à-vis de la TVA avec sa propre administration fiscale.

Si l’acheteur est un particulier (activité B2C), c’est un peu différent. Si le vendeur et l’acheteur sont sur le même territoire, la TVA de ce territoire s’applique (en général, mais là encore, il y a des exceptions…). S’ils sont sur des territoires différents, c’est la TVA du pays de l’acheteur qui doit s’appliquer. Et comme ça n’a pas toujours été le cas, c’est le moment d’aborder les gros changements apportés à la TVA en 2021.

“Paquet TVA e-commerce” : une réforme majeure dans l’UE en 2021

Avant l’arrivée du Web, peu de particuliers achetaient leurs produits à l’étranger. Un pays pouvait donc imposer ses règles de TVA sur son sol sans trop de difficultés. La complexité existait sur les échanges internationaux entre entreprises, mais les mécanismes étaient (à peu près) bien établis, tracés et contrôlés.

L’explosion des sites e-commerce et des marketplaces sans frontière a bouleversé la situation et favorisé la fraude massive à la TVA, notamment via le dropshipping des marketplaces (vente d’un produit par un vendeur tiers à l’étranger à un particulier sur le sol de l’UE, sans que l’exploitant de la marketplace ne soit fiscalement impliqué).

Désormais, c’est fini ! Du moins, dans les pays de l’Union européenne (UE). Ce que l’on nomme “Paquet TVA e-commerce”, appliqué depuis juillet 2021, est une série de directives et de règlements européens qui comblent la fuite de TVA, tout en simplifiant un peu la gestion côté commerçants.

Maintenant, dès que vous dépassez 10 000 € de chiffre d’affaires sur l’ensemble des pays de l’UE (ça va vite !), vous devez appliquer la TVA du pays de destination sur chaque commande. En-dessous de ce seuil, vous appliquez la TVA de votre pays, sauf si vous optez pour une application de la TVA du pays de destination dès le premier euro (une option intéressante si l’on souhaite s’épargner des coûts importants sur les règles de calcul dans les outils).

Dans cette réforme, les marketplaces sont considérées comme les fournisseurs des clients finaux, elles doivent donc appliquer les taux de TVA aux produits vendus par des tiers (y compris hors UE) et se charger de déclarer la TVA (selon les cas décrits ci-dessous).

Les assujettis sont toutes les entreprises qui vendent des produits et services destinés à des particuliers des pays de l’UE, y compris les entreprises hors UE !

Pour éviter aux commerçants de l’UE des déclarations et règlements laborieux de TVA dans chaque pays de l’UE (là où sont ses clients), un guichet unique a été créé pour gérer les ventes entre états membres de l’UE : le One Stop Shop (OSS). La TVA collectée y est déclarée et c’est l’administration fiscale du pays du vendeur qui se charge de redistribuer la TVA dans les pays concernés (via un système de balance de TVA entre pays de l’UE). En France, l’OSS est accessible depuis le site officiel des impôts.

Lorsqu’un site ou une marketplace vend un produit provenant d’un pays hors UE, il y a désormais deux cas :

  1. Pour un envoi d’une valeur HT supérieure à 150 €, la TVA est appliquée à l’importation et des droits de douane s’y ajoutent (comme avant la réforme). La TVA est déclarée à la douane de manière électronique et ces formalités sont effectuées par les affréteurs et transporteurs agissant pour le compte des acheteurs en ligne.
  2. Pour un envoi d’une valeur HT inférieure ou égale à 150 €, le commerçant peut passer par un guichet spécifique aux importations, l’IOSS (Import One Stop Shop). L’avantage est de supprimer toutes les contraintes administratives à la livraison côté client final, puisque la TVA est appliquée lors de la vente. Attention, il existe quelques exceptions (alcool, tabac…) !

Il faut noter qu’une nouvelle déclaration est mise en place par la douane française pour les envois d’une valeur de moins de 150 € : la déclaration H7. Dotée d’un jeu de données très réduit, elle est déposée dans un service en ligne haute disponibilité, adapté aux activités e-commerce : Delta H7.

Vous remarquerez que les seuils sont calculés sur les envois, et non les produits ! Les 150 € sont donc vite atteints avec un colis bien rempli. Ce qui a pour effet de bord d’encourager les envois multiples…

Attention ! Il n’y a plus d’exonération pour les produits importés dans l’UE d’une valeur inférieure à 22 €. Tout y passe, désormais !

TVA et expérience client : un sujet à ne pas négliger !

Pour le moment, nous avons parlé de gestion, de calculs, de contraintes, de procédures, de techniques… Mais les clients finaux dans tout ça, comment sont-ils impactés par l’application de la TVA ? Ils ont la lourde responsabilité de payer la TVA sur les produits qu’ils achètent ! Autant rendre son application claire et transparente, grâce à un bon travail UX (user experience) en amont.

Le “Paquet TVA e-commerce” a un grand mérite, il place le client dans un contexte qu’il connaît : la fiscalité de son pays. Il peut donc plus facilement comprendre et comparer les offres. L’application de la TVA est systématique, avec les taux qui correspondent aux produits qu’ils consomment habituellement sur son territoire. D’un point de vue UX, c’est plutôt une bonne nouvelle, avec une généralisation des pratiques d’affichage de la TVA à certaines étapes du parcours client (sachant qu’il y a peu d’obligations en la matière). Nous verrons quelques détails intéressants sur ce sujet dans le second article.

Si un site e-commerce ou une marketplace hors UE n’applique pas la TVA au moment de la vente (c’est encore le cas le plus courant, même pour les produits de moins de 150 € et malgré l’application du “Paquet TVA e-commerce”), le client particulier d’un pays de l’UE se verra réclamer par le transporteur le paiement des droits et taxes (avec d’éventuels frais de gestion), lors de la livraison. Une surprise plutôt désagréable pour le client qui n’a pas vérifié l’application de la TVA lors de la commande…

L’idéal, c’est le site e-commerce ou la marketplace qui agit sur un marché local (un seul pays de l’UE par exemple). Les risques et les contraintes sont minimes. Par contre, dans le cas d’un site Web international qui présente une offre avec des prix HT pour l’ensemble des clients dans le monde, la difficulté sera d’amener le client à accepter l’application de la TVA lors de la commande. À quel moment de son parcours faut-il aborder le sujet ? Comment gérer le cas des visiteurs non connectés (donc non localisés) qui vont s’identifier pendant la phase d’achat ? Dans ce genre de situations, le travail de conception fonctionnelle, UX et UI s’avère crucial.

Un dernier conseil aux commerçants : vous avez tout intérêt à communiquer sur la façon dont vous gérez la TVA, notamment si vous exploitez le guichet IOSS pour des produits provenant d’un pays hors UE. C’est un avantage à mettre en avant car il évite les mauvaises expériences à la livraison (TVA et frais à régler) !

Et maintenant, quoi faire de tout ça ?

Voilà pour la théorie et le cadre réglementaire ! Reste à les appliquer correctement… et les questions ne manquent pas. Dois-je afficher les prix TTC, HT, les deux ? Comment gérer TVA et frais de port ? Comment calculer la TVA selon les lignes de produits, les quantités et les taux de TVA ? Que se passe-t-il avec les promotions ? Des sujets concrets et pratiques qui seront au cœur de notre prochain article !

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