11e Forum Européen de l’Accessibilité Numérique

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Le 19 juin avait lieu à la Cité des Sciences et de l’industrie de Paris, la 11e édition du Forum Européen de l’Accessibilité Numérique. Le thème de cette édition était : « Le numérique au service d’une culture plus accessible ».

Ce forum, organisé par l’association BrailleNet, a réuni de nombreux intervenants provenant de différents pays et a permis d’ouvrir le débat sur l’utilisation du numérique pour les personnes en situation de handicap afin d’accéder et de participer à la vie culturelle.

Expérience et attentes des utilisateurs en situation de handicap

Jacques SEMELIN, historien et politologue, nous confie qu’il est en résistance face à la dictature des images. Les voyants ont parfois tendance à oublier à quel point les images sont omniprésentes dans notre quotidien. Il est important de pouvoir fournir des alternatives (textuelles ou en braille) afin de restituer l’information aux personnes ayant une déficience visuelle.

Il poursuit en nous parlant de DAISY, le consortium qui a rédigé une norme pour livres audio, et qui selon lui a révolutionné l’usage du livre numérique. Il est désormais possible d’avoir une expérience de livre audio standardisée et bien plus riche, puisqu’on peut réagir et commenter.

Ses souhaits ?

  • Augmenter la présence du numérique dans notre vie quotidienne et permettre ainsi un accès universel
  • Développer l’accès à la culture sur le Web. C’est une encyclopédie mondiale de savoir et il est important qu’elle soit la plus inclusive possible.

Melchior DEROUET, comédien et concepteur événementiel, a un rapport très fort au texte. Il est aveugle de naissance et a attiré notre attention sur l’interprétation d’un texte vocal. Lorsqu’une synthèse vocale restitue oralement un texte, l’auditeur a accès à une interprétation et non au texte brut.

Selon lui, le numérique est une vraie avancée pour l’accès à la lecture. Un livre en braille est souvent bien plus gros et encombrant que son homologue classique. Le numérique permet de gommer cette contrainte.

Son souhait ?

  • Que le W3C et notamment les WCAG soient plus répandus et mieux connus du secteur public.

Des approches globales pour des services culturels inclusifs

L’action du ministère de la Culture et de la Communication en faveur de l’accès à l’offre culturelle, via le numérique

Sandrine SOPHYS-VERET, chargée de mission Culture et Handicap au Ministère de la Culture et de la Communication, nous a rappelé l’exception handicap concernant le droit d’auteur. En effet il est possible de rendre accessible une oeuvre (ce qu’on nomme couramment une oeuvre adaptée) sans être contraint par le droit d’auteur.

Où est-il possible de trouver ces oeuvres adaptées ? Par exemple sur la plateforme Platon de la Bibliothèque nationale de France. Un des objectifs du ministère est de renforcer le rôle des bibliothèques territoriales afin d’améliorer la distribution et le partage des œuvres adaptées.

Il y a également de nombreuses avancées dans le secteur patrimonial, comme les musées. On peut citer les classiques audio guides mais aussi des dispositifs plus récents comme le robot de visite à distance Norio au château d’Oiron ou les lunettes connectées avec prise en compte de la LSF (Langue des signes française).

Le prochain chantier, que nous suivrons avec attention à Clever Age, est la mise en place d’un baromètre accessibilité numérique des sites internet des établissements publics culturel.

Produire et diffuser des livres numériques accessibles

Jesper KLEIN, président du consortium DAISY, nous indique que « lire un livre est la seconde activité culturelle » selon une enquête européenne réalisée en 2013. Pourtant, selon une autre étude de la World Blind Union, 90 % des oeuvres publiées ne peuvent pas être lues par une personne ayant une déficience visuelle.

Le rôle du consortium DAISY est de standardiser les livres numériques audibles mais également de :

  • soutenir les bibliothèques qui proposent des oeuvres adaptées
  • soutenir la publication inclusive
  • étendre les livres accessibles au plus grand nombre.

C’est d’autant plus vrai pour le dernier point, que le traité de Marrakech, favorise l’échange international du livre numérique partout dans le monde.

OPALINe, un projet de R&D au service du livre accessible

Alex BERNIER, directeur de l’association BrailleNet, nous a présenté le projet OPALINe. Il s’agit d’une plateforme d’édition collaborative qui a pour but de favoriser et faciliter la création des oeuvres adaptées.

Il nous a donné un exemple très parlant, la rentrée scolaire. Chaque année différentes associations s’occupent d’adapter les manuels scolaires pour la rentrée. Ces associations font le même travail et chacune dans leur coin. C’est une perte de temps et d’énergie et c’est ce que le projet OPALINe aimerait optimiser. En offrant une plateforme d’échange, il sera possible de mutualiser et optimiser ce travail d’adaptation, mais aussi de le dégrossir grâce à des outils d’automatisation.

Le numérique, un levier pour promouvoir l’accès et la participation de tous à la vie culturelle

Lever les barrières physiques et sociales pour encourager la création musicale

Gawain HEWITT de chez Drake Music nous a partagé plusieurs retours d’expérience. Il y a par exemple la co-création d’une guitare se jouant à un seul doigt. Elle se nomme Kellycaster et elle est née suite à la rencontre d’un guitariste qui, à cause d’une déficience physique, ne pouvait plus jouer de la guitare.

Valoriser le handicap comme moteur de créativité

David LEMOINE et Antoine CAPET de BrutPop fabriquent des instruments de musique adaptés en Fab Lab. Ils s’adressent particulièrement à un public avec des déficiences cognitives et c’est pourquoi il est important de simplifier au maximum les instruments. Un de leur objectif est également de créer des instruments de musique adaptés à bas prix. Ils ont par exemple créé Rock Minute, un kit de lutherie électrique simplifiée.

Les Jodi Awards : considérer le handicap au travers du prisme de la culture numérique accessible

Ross PARRY, de chez Jodi Mattes Trust, nous a ensuite parlé des Jodi awards. Il s’agit de récompenser les organisations qui utilisent la technologie pour permettre au plus grand nombre l’accès à la culture et ainsi effacer les inégalités. Par exemple en 2015, le Musée canadien pour les Droits de l’homme a reçu ce prix pour son engagement dans l’accessibilité numérique et notamment pour son application mobile (réalité augmentée, sous-titrage, langue des signes, carte interactive etc).

Complémentarité entre les approches compensatrice et inclusive de l’accessibilité

Rendre les médias accessibles – les stratégies de France Télévisions

Matthieu PARMENTIER nous fait part des engagements de France Télévisions en matière d’accessibilité numérique :

  • sous-titrage pour les personnes ayant une déficience auditives pour 100 % des programmes nationaux
  • des inédits audio décrits chaque jour
  • trois éditions quotidiennes d’information traduite en LSF

Pour répondre à cette problématique ils ont :

  • fusionné les solutions de sous-titrage Web et TV
  • intégré le coût du sous-titrage dès le début des process
  • créé, au sein d’un groupement, un lecteur vidéo aux fonctionnalités avancées en HTML5 et accessible : Media4Dplayer.

Handicap et culture: concevoir autrement pour tous

Marion BOISTEL, de l’association Signes de Sens, nous a parlé du projet Muséo. A l’origine il s’agissait d’un projet pour visiter le musée de façon ludique et plus particulièrement adressée aux enfants. Sauf qu’au final cette application s’est révélée être également très utile pour certaines personnes en situation de handicap. On voit ici l’importance de la conception universelle et l’importance d’inclure plutôt que de segmenter.

Mon point de vue

Le numérique est un formidable outil qui permet de gommer les situations de handicap et faciliter l’accès à l’information et à la culture. Rappelons qu’une personne est en situation de handicap à cause du contexte et de son environnement et non à cause de sa déficience.

Qu’il s’agisse d’accessibilité numérique, de conception universelle ou d’inclusion, il est à mon sens primordial de garder en tête qu’un musée, une bibliothèque, un théâtre, une application, un site Internet etc est avant tout destiné à un utilisateur. C’est cet utilisateur qui doit être au centre de toutes les réflexions afin qu’il puisse non seulement accéder à l’information mais qu’il puisse également en tirer la meilleure expérience possible.


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